Sainte Anne d’Auray est le site religieux le plus célèbre de Bretagne. Hier, samedi, 40.000 personnes étaient attendues pour la fête de sainte Anne. Il y a quelques années, le pape Jean Paul II est venu lui même présider le pélerinage. Au caractère religieux de l’événement se mêle le caractère régionaliste breton (chants, danses et costumes bretons). C’est le moment et le lieu de la défense de la culture bretonne. Religion (pas foi !) et militantisme régionaliste font bon ménage. Dieu y retrouvera sans doute les siens.
Si le lieu de Sainte Anne Auray est célèbre en Bretagne, c’est que c’est ici qu’est apparue à un pauvre berger, Nicoladzic (homonyme du maire de Baden…), Anne, mère de Marie et grand mère de Jésus. Je dis « est apparue » et non « serait apparue »… Les bretons y tiennent. Mais, moi (ni Marie France d’ailleurs) qui ne suis pas du tout un adepte de ces lieux de pélerinage dont on sait qu’ils sont pratiquement tous d’anciens lieux de culte païen (celte, romain ou gaulois), je me pose 3 questions:
La première: le nom d’Anne n’apparaît nulle part dans les évangiles, sauf dans des livres apocryphes écrits, pour certains, quelques siècles après la mort de Jésus. Bizarrement, l’Eglise qui renie les apocryphes et leur dénie tout fondement historique et théologique, reconnaît le nom d’Anne et valide l’apparition au « brave » berger.
La seconde question: selon la légende, pardon selon l’Histoire (bretonne!), c’est au lieu dit « Sainte Anne d’Auray » qu’est apparue Anne. Or sur ce même lieu, les historiens ont découvert qu’il existait un lieu de culte gaulois consacré à ANN, la déesse mère gauloise. Vous avez dit bizarre…? Mais surtout, ne dites pas ça à un breton, il ne vous croirait pas. Car, même s’il est incroyant, il est convaincu qu’Anne est bien apparue ICI au petit berger breton…
Enfin la troisième question: les évêques et les cardinaux (c’est le cardinal Barbarin de Lyon qui est venu hier) qui président les pélerinages de Saint Anne, et qui connaissent nécessairement (ils ne sont pas idiots) l’origine gauloise de ce lieu de culte, croient-ils cette belle histoire d’Anne qu’ils racontent aux braves pélerins venus en masse à Sainte Anne d’Auray.
Ma remarque finale: aucun de mes collègues étudiants en théologie et aucun de mes profs. de théologie ne croient cette (belle) légende de l’apparition…
Mais pour de plus amples informations, n’hésitez pas à interroger Fitty et Brigitta: ils sont actuellement en vacances dans la région et sont allés se recueillir très très très très longuement à Sainte Anne. Ils nous ont promis de faire un long article sur ce prestigieux lieu de culte. Je pense même qu’ils ont été (presque) convaincus par les discours des bretons… Ils sauront peut-être mieux que moi, l’hérétique, vous convaincre.
Denis, je ne suis pas surpris que l’institution religieuse officielle « cautionne » d’anciens cultes païens: c’est ainsi qu’elle a construit son influence au fil des siècles par récupération de nombreux mythes et rites des civilisations qui l’ont précédée. Les « petits arrangements » de l’église avec les traditions locales sont assez fréquents.
sur le mur païen du mont Sainte Odile il y a un chemin de croix 😕
Jacques, je ne sais pas si le mot « arrangemnt » est le mot adéquat. Il y a eu en fait passage naturel ou parfois (souvent) « musclé » (manu militari) d’une religion à une autre. Il suffisait qu’un prince, un roi, un sage ou un individu éminent changent de religion, pour que leurs sujets ou leurs disciples changent aussi de religion et adaptent les mythes qu’ils conaissaient et pratiquaient.
Le phénomène se rencontre dans toutes les grandes religions (Grèce, Egypte, Rome, Babylone, Israël, christianisme) ou tous les grands mythes (Asclépios, Dyonisos, Isis ou Osiris…, avec notamment les mythes de la virginité).
Dans le christianisme, les phénomènes les plus visibles ont été les décisions de Constantin le Grand et de Théodose (édit de Milan de 313 par Constantin, puis de l’empereur Théodose en 392 qui interdit toute forme de paganisme ).
D’ailleurs, l’Ancien Testament est rempli de pages qui évoquent les transferts d’une religion à une autre, et les utilisations d’une religion par une autre religion. La Bible n’a pas été créée ex-nihilo, elle porte les marques éminentes de toutes les cultures (religieuses ou pas) environnantes. Affirmer le contraire, c’est faire preuve d’un fondamentalisme moyen âgeux. Aujourd’hui, heureusement, aucun théologien et aucun exégète sérieux (depuis Pie XII) ne nient cette évidence.
eh Denis tu oublies le « chanoine des latrines » qui règne sur « les w-chés «